Mon cher Maurice,
Je te fais une petite lettre aujourd'hui pour me reposer de toujours faire de la couture. Depuis quelques jours il y a une mandoline chez madame Margottat et j'en joue un peu ainsi que du piano. J'espère que tu te portes bien et que tes "hommes" t'obéissent.

Grand-mère me charge de te demander si Marcel Trousset t'a dit ce que devenait Georges ? s'il a été

opéré ? s'ils sont toujours à Fismes ?
Voilà qu'il fait très beau maintenant. C'est dans 14 jours la rentrée, j'en suis contente. Je vais avoir bientôt fini les devoirs de vacances.

Je brode toujours des bas de pantalon. J'en suis déjà à la moitié du deuxième bas de pantalon. En dehors du travail je m'amuse avec Marie et Lucette Margottat. Nous jouons aux prisonniers boches. Il y en a une qui monte la garde devant la porte et les deux autres se cachent dans la maison. C'est la première trouvée par la sentinelle qui prend sa place. Nous allons aussi au troisième ainsi qu'à la cave pour nous cacher. Nous voyons souvent passer des personnes avec des malles et nous nous demandons quand ce sera notre tour.

Est-ce que tu viendras bientôt en permission ? Je voudrais bien te voir en soldat. Papa a eu bien de la chance de te voir plusieurs fois.
Nous avons vu le commandant Laffaix. Il dit qu'il y a

un devin qui a annoncé la fin de la guerre pour 1918. Ce serait encore rudement long. Heureusement qu'on n' y croit pas.

Je ne vois plus rien à te dire et je vais aller broder encore un peu. Je t'embrasse de tout mon cœur.
Ta sœur qui t'aime.

Reine-Marie

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