JACQUES MOLINOS (1743-1831)

Né à Lyon, il y subit l'influence du bon architecte Pierre-Gabriel Bugniet, son aîné de quelques années. Il est connu sous Louis XVI pour ce qu'il a réalisé à Paris et à Brest en collaboration avec son ami Jacques-Guillaume Legrand (voir ce nom). Ils visitèrent ensemble l'Italie en 1785, édifièrent en 1789 la maison qui porte encore leurs initiales, 6, rue Saint-Florentin. Cependant, dès cette époque, une part de l'oeuvre de Molinos est personnelle : maison et jardins Jacquin au Pré-Saint-Gervais, 1775, Jardin Julien à Épinay (Krafft, Architecture civile, pl. 71). La plus belle oeuvre que nous ayons reconnue est le château aujourd'hui disparu de Puisieux, près de Villers-Cotterêts, construit pour le marquis Louis-Zacharie de Vasan, de 1780 à 1784 (projet, Arch. nat., Z1J 1055). 

Molinos fut sous la Convention l'architecte du Muséum d'histoire naturelle. En 1794, il compléta avec tact l'amphithéâtre construit par Verniquet par ordre de Buffon ; sont de lui, sur les côtés et vers la rue Cuvier, les trois absides destinées à servir de labora­toires. Dans cet amphithéâtre eurent lieu, du 19 janvier au 18 mai 1795, les premiers cours de l'École normale supérieure, qui furent publiés. Au Jardin des Plantes, Molinos édifia l'orangerie, les serres tempérées ; il aménagea la fosse aux ours.

Architecte de la Ville de Paris sous l'Empire et la Restauration, Molinos y fut l'ordon­nateur des fêtes et édifia de nombreux bâtiments publics : marché Saint-Honoré, 1809, marché Popincourt, Fontaine­Valhubert. La Halle au Vieux Linge, composée de quatre pavillons entourant le Carreau du Temple (1809) a été décrite par Eugène Sue dans les Mystères de Paris.

Molinos a complété, mais sur des plans modestes, les bureaux de l'octroi que ni Ledoux ni Antoine n'avaient achevés. Sous la Restauration, l'art de Ledoux sembla plus que jamais faire outrage, non seulement à l'orthodoxie architecturale, mais aussi à l'ordre politique établi. C'est pourquoi Molinos évita le style de Ségeste. En 1822, devant achever les deux bâtiments de la porte de Charenton, il proposa au conseil des Bâtiments civils de « transformer les colonnes actuelles et leur entablement en imitation du temple de Thésée à Athènes », ce qui fut fait.

Molinos fit aussi le bâtiment de la Morgue, entre Notre-Dame et la Seine, qui a rempli sa fonction jusqu'à la construction, par A. Tournaire, de l'Institut médico-légal du quai de la Rapée : c'est l'édifice de Molinos que les écrivains du xixe siècle, de Henri Heine à Daudet, ont évoqué.

Homme de culture, Molinos avait réuni une belle bibliothèque. Il fut élu à l'Institut en 1829. Son fils, l'architecte Auguste Molinos, a bâti les églises de Bourg-la-Reine et de Fontenay-aux-Roses. Leur descendance se perpétue dans la famille des princes Walewski.