Lissette Rosales Sánchez, Françoise Pirot, Mahdokht Karampour & Xinmin Hu
Objectif
L’objectif de cet exercice est de représenter les perceptions et les ressentis des enquêtés-spectateurs-promeneurs lorsqu’ils parcourent virtuellement un itinéraire qui mène à la “cascade du Saut du Gendarme” en Martinique à travers la réalisation d’une carte sensible. L’enquête a été réalisée auprès de 10 personnes et la visite filmée dure environ 5 minutes.
La carte est une composition sensible d’un parcours commun. Comme résultat final, un récit multiple de ce trajet est alors attendu, à travers une carte commune poétique et hasardeuse.
Attente du protocole
Au travers des questionnaires partagés avec les spectateurs, les enquêtrices envisagent d’accéder à une palette de ressentis personnels de chaque enquêté-promeneur, relevés à chaque étape de cette visite virtuelle. Au travers des questions, les sensations physiques, les ressentis climatiques, les sens principaux de l’odorat, de la vue, de l’ouïe et du goût sont convoqués afin d’aborder une multitude de ressentis.
La contrainte de temps était un facteur à prendre en considération, aussi bien dans le recueil des données que dans leur traitement ainsi que dans la réalisation de notre carte collective.
Une fois les ressentis répertoriés pour chaque portion du trajet, les enquêtrices souhaitent représenter l’ensemble du trajet par des nuages multiples et nuancés de mots qui se forment différemment, selon les mots partagés par les enquêtés et la fréquence de leur répétition.
Lors du traitement des questionnaires, la difficulté rencontrée est l’écart existant entre l’attente et le résultat concernant la question initiale que nous découvrons mal formulée au début du questionnaire. Les enquêtrices se rendent compte que, suite au manque de clarté aussi bien dans l’explication orale lors de la consigne au début de l’enquête que dans la formulation d’une des questions, celle-ci n’a pas été traitée entièrement par l’ensemble des enquêtés, ce qui a empêché d’accéder à davantage de réponses et donc de mots. Il aurait fallu être plus explicite aussi bien dans la présentation orale que dans le début du questionnaire afin que la consigne soit mieux suivie.
Processus de création et justification de la sélection des outils
Le processus d’élaboration du protocole de recherche pour l’actuelle cartographie sensible a commencé par la discussion sur l’objectif central à poursuivre avec cet exercice. En principe, la première question à répondre en équipe était : que voulons-nous traiter ? Parmi les idées qui ont émergé, on a pensé à la relation qui pourrait exister entre le fait d’avoir vécu le confinement proche ou loin de la nature et comment cela pourrait affecter la perception d’un tel lieu. On a également proposé d’aborder la perception par type de profession exercée par l’enquêté-spectateur, mais à la fin, l’équipe a décidé qu’elle se concentrerait sur la représentation et la recherche de points communs concernant les sensations et les perceptions que les différentes personnes évoquent en observant la vidéo et en enregistrant les éléments qui restent fixés dans leur mémoire.
La deuxième étape a consisté à déterminer comment ces informations seraient accessibles et comment elles pourraient être représentées dans une cartographie sensible. L’un des principaux obstacles a été de discuter de la question de savoir si les réponses des personnes interrogées devaient ou non être dirigées; alors, un questionnaire semi-directif a été choisi pour permettre d’établir un point de départ commun entre les expériences et de les comparer par la suite. Le questionnaire a été divisé en deux, pour la première partie sept points stratégiques ont été établis au cours du parcours et des questions ont été conçues sur les sensations physiques et les éléments qui ont le plus attiré l’attention des spectateurs pour chacun de ces points, de cette façon, nous pourrions représenter le parcours et y situer (dans l’espace) les sensations et perceptions partagées. La deuxième partie du questionnaire porte sur l’expérience en général et explore d’autres types de sensations liées au goût, à l’odorat, au son et au toucher en relation avec l’environnement, ainsi qu’un exercice de synthèse sur l’expérience.
Par la suite, on a établi comme base de la cartographie, la représentation du parcours affichée au début de la vidéo sur une carte du site, puis on a comparé toutes les réponses obtenues en transcrivant celles-ci dans un document Word. Ensuite, on a discuté de la meilleure façon de représenter visuellement ces réponses, on a discuté entre les dessins et les mots, on a choisi la représentation visuelle par des mots et on a proposé d’utiliser des “nuages de mots” qui est un outil permettant de représenter graphiquement des mots ou des concepts clés.
Pour son élaboration on a utilisé un logiciel qui, à travers un algorithme, génère la représentation des mots les plus utilisés dans un texte. Pour cela, il a fallu travailler et nettoyer les réponses pour obtenir les mots ou les adjectifs qui décrivent concrètement les sensations et les perceptions du spectateur.
Enfin, la cartographie a été établie en identifiant les sept points stratégiques et chacun des nuages correspondants, ainsi que les nuages générés par les expériences en général.
Description de la carte sensible
La carte intitulée «Poétique de la cascade du Saut du Gendarme» évoque d’une part les perceptions visuelles perçues par les promeneurs qui parcourent le lieu de la cascade du saut du gendarme en empruntant un chemin qui part de la route pour accéder, via des escaliers et un pont, à la cascade tout en profitant de la végétation environnante et des lieux de pique-nique pour ensuite revenir au point de départ, d’autre part les sensations physiques ressenties, les perceptions auditives, olfactives et gustatives perçues par les promeneurs durant leur circuit. La carte ainsi obtenue est une carte mentale interprétative car ce sont les appréciations concernant les lieux ainsi que leur ambiance conviviale et environnementale qui y sont visualisées et cartographiées.
Les informations qualitatives représentées sont issues d’une enquête faite auprès de 10 personnes. Cette enquête a été réalisée suivant un protocole établi par le groupe 1 et formalisé par un questionnaire soumis aux enquêtés après avoir visionné une vidéo intitulée « cascade du Saut du Gendarme »
Deux catégories d’information qualitative sont visualisées et cartographiées à des échelles de mesure différentes à savoir l’échelle de mesure nominale et l’échelle de mesure ordinale. La première catégorie correspond à l’information qualitative « objective » concernant le tracé du parcours emprunté par les promeneurs et les points d’ancrage spatial (route, escaliers, pont, lieux de pique-nique, cascade). Celle-ci est visualisée à l’échelle de mesure nominale ou d’équivalence car le tracé du parcours et les points d’ancrage spatial ont tous la même importance, le même poids. Le tracé du parcours est représenté par un trait linéaire ayant une épaisseur constante tandis que les points d’ancrage spatial sont représentés par des symboles figuratifs caractérisant chaque point d’ancrage spatial.
La deuxième catégorie correspond à l’information qualitative « subjective » traduisant les sensations, les émotions et les perceptions ressenties et perçues par les enquêtés dans le lieu de « la cascade du saut du gendarme ». Cette deuxième catégorie est un ensemble composé de deux sous-ensembles. Le premier sous-ensemble intègre les perceptions visuelles ressenties par les enquêtés. Celui-ci est représenté par des nuages de mots qui jalonnent le tracé du parcours entre chaque point d’ancrage spatial. Le deuxième sous-ensemble intègre les sensations physiques, les perceptions olfactives, climatiques, auditives et gustatives perçues par les enquêtés. Ce dernier est représenté par des nuages de mots positionnés de part et d’autre du tracé du parcours.
Les nuages de mots composant les deux sous-ensembles ont des formes et des couleurs différentes. Les mots des nuages sont composés de lettres dont la taille est proportionnelle à la fréquence des mots utilisés. Une hiérarchie, un ordre sont alors introduite dans le nuage de mots. Ainsi, dans les deux sous-ensembles, l’information qualitative est visualisée à l’échelle de mesure ordinale. Il y a autant de nuage de mots que de questions posées dans le questionnaire. Chaque nuage de mots visualise le contenu et/ou la synthèse des réponses faites à une question. Ainsi, le cœur du nuage de mots constitué par les mots dont la taille des lettres est la plus grande, met en évidence la ou les sensation(s) et perceptions dominante(s) pour une question donnée. Deux exemples : 1- le nuage de mots se trouvant au départ du parcours, est de forme oblongue et aux couleurs vives. Son cœur met en évidence les perceptions visuelles par les mots végétation, escaliers, marches, cascade; 2- le nuage de mots se trouvant à l’extrême droite de la route est de forme rectangulaire et aux couleurs pastels. Son cœur met en évidence des sensations et perceptions de chaleur, d’humidité, de température.
L’ensemble de tous les nuages de mots permet d’avoir une description et une interprétation globale des sensations ressenties, des perceptions et des impressions perçues au sein des lieux et des environnements de « la cascade du saut du gendarme » à savoir l’humidité, l’ambiance tropicale, la fraîcheur, les joies des baignades, repos, détente etc…
Légende de la carte mentale interprétative : «Poétique de la cascade du Saut du Gendarme»