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J’ai commencé ma carte par tout en bas de la page, à droite. J’ai dessiné d’abord les contours de mon pays natal, l’Iran. Puis j’ai pointé Téhéran, la ville où j’ai grandit, que j’ai dû quitter en 2004 pour Paris, pour poursuivre mes études entre autres. 
 
Ensuite, je me suis déplacée vers le haut de la page, à gauche. J’ai dessiné d’abord Père Lachaise, « la forêt », où je me promène quasiment tous les jours, rien que pour remplir mes poumons et mes yeux de l’air et du vivant pour quelques minutes. Elle se trouve au bout de ma rue. 
 
Puis après j’ai dessiné la place de la Réunion, le cœur de « mon village », où j’habite. Ensuite j’ai découpé le Père Lachaise en deux, Haut Père-Lachaise où je me balade sur la terrasse qui domine le domaine. Puis j’ai dessiné le contour des villages voisins, Ménilmontant et Belleville, où beaucoup d’amis habitent. Mon territoire intime s’arrête là, une ligne pointillée le démarque de Paris et le Monde. 
 
Plus bas j’ai dessiné cet œil. Depuis ma maison de la Réunion j’ai l’œil vers l’Iran, que je suis de loin avec beaucoup de préoccupation. Dernièrement mon œil a pleuré rouge pour mon pays. 
 
C’est en dernière étape que j’ai dessiné les contours de Val de Marne, le territoire de mon travail professionnel, de mon terrain d’étude aussi. Pendant presque 8 années j’ai travaillé dans un foyer d’accueil d’urgence des mineurs isolés étrangers de la Croix-Rouge. J’emploi le passé composé du verbe « travailler », j’ai aussi dessiné une croix dessus, car je le quitte.

Mon projet de recherche en Master se porte sur les modes d’habiter des mineurs migrants primo-arrivants que j’ai accompagnés pendant ces dernières années dans leur nouveau territoire. Occupants, habitants ou plutôt les devenir-habitants, je questionne leurs pratiques spatiales dans la ville, en me penchant notamment sur l’importance du  Navigo comme un passeport de circulation de ces nouveaux arrivants dans la ville. 
 
Ma carte reflète ma géographie intime le 9 mars 2020. Elle aurait pu être autre, sans doute. 

Mahdokht Karampour

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